samedi 23 février 2013

La taxe municipale sur les chiens

Lors d’une séance de l’Assemblée nationale du 1er mars 2000, les députés Gantier (Paris), Dominati (Paris), Meylan (Haute-Savoie), Moyne-Bressand (Isère) et Proriol (Haute-Loire) présentaient un projet de loi « tendant à permettre aux communes d’instituer une taxe facultative sur les chiens et visant à améliorer le contrôle sanitaire sur les animaux domestiques », taxe à hauteur maximale de 500 Francs (75 euro).

Taxer nos compagnons canins ? L’idée semble originale... Pourtant, elle est loin d’être nouvelle.


En France, les premières évocations de cette imposition datent de 1770. Pour retrouver l’origine de la mise en place effective de cette taxe, il faut aller jusqu’aux délibérations du conseil général de la Seine qui la proposait dès 1852 et la voyait comme « le seul moyen de prévenir l’accroissement incessant de l’espèce canine, et les nombreux accidents dont elle est chaque année la cause ».

La dangerosité du chien serait le sujet d’un débat trop complexe...

Toujours est-il que, lors de cette même délibération, le point a été mis sur le peu d’utilité que représente cet animal : « On arrivera plus sûrement que par tout autre moyen à la réduction de ces animaux, qui absorbent aujourd’hui, en France, une quantité considérable de substances alimentaires qui pourraient être employées à la nourriture d’animaux plus utiles ».

Dangereux, inutile, trop coûteux, trop nombreux... : le chien, devenu au cours du XIXème siècle un véritable animal domestique commun, réunissait l’essentiel pour qu’une taxe soit fixée sur son cas.

Le 2 mai 1855 est votée la loi « établissant une taxe municipale sur les chiens », modifiée par le décret du 4 août 1855, et entrant en application à partir du 1er janvier 1856. Le produit de cet impôt allait directement aux communes concernées. Chaque conseil municipal en décidait le montant, devant être compris entre 1 et 10 Francs à l’origine, le conseil général étant chargé d’approuver ou non ces tarifs. La taxe ne concernait que les chiens sevrés possédés au 1er janvier, suivant une déclaration à faire en mairie entre le 1er octobre et le 15 janvier. Deux types de chien étaient alors distingués : les chiens d’agrément ou servant à la chasse, ayant la taxe la plus élevée, et les chiens de garde, incluant ceux servant à guider les aveugles, à garder les troupeaux, les habitations, magasins ou ateliers. Ceux pouvant être classés dans les deux catégories étaient répertoriés dans celle dont le tarif était le plus élevé.

Rapidement, la loi fut confrontée à de multiples problèmes de compréhension et d’interprétation, d’où une importante jurisprudence. Ainsi, comment taxer un chien de chasse ou de garde infirme ? Devient-il un chien d’agrément ? Les exemples pouvaient se multiplier.

Bénédict-Henry Revoil, dans son Histoire physiologique et anecdotique des chiens (1867), comptabilisait plus de 1,9 millions de chiens soumis à la taxe en 1866. Cela va sans dire que l’impôt incitait à la dissimulation, l’abandon voire la mort des animaux dont on ne voulait pas payer la taxe.

Comme le précise le document présenté à la fin de cet article, la loi du 31 juillet 1920 a modifié le texte législatif initial. L’article 14 de cette loi « portant fixation du budget général de l’exercice 1920 » changeait les tarifs maxima de la taxe et distinguait désormais les chiens d’agrément (les plus taxés) des chiens de chasse, comme le précise le tableau ci-dessous. Aussi, les chiens d’aveugles ou appartenant à des mutilés de guerre ayant au moins 80% d’invalidité, étaient dorénavant exemptés de toute taxe.



Mais surtout, et cela a été oublié, la taxe sur le canis lupus familiaris était perçue par les communes en même temps que la taxe d’habitation, et ce jusqu’à la fin des années 1970. Un possible retour de cette imposition a été plusieurs fois à l’ordre du jour des sessions parlementaires.

Les Archives départementales possèdent notamment les rôles de l’impôt classés selon la commune (série E-dépôt).



Avis du directeur des contributions directes de l’Ain transmis au préfet de l’Ain concernant l’approbation de la fixation de la taxe municipale de Ramasse sur les chiens (1921). (sous-série 2 O, commune de Ramasse)

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